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Non-vaccinés : un professeur d’éthique médicale se demande si on pourrait aller jusqu’à les refuser en réanimation

Emmanuel Hirsch, professeur d’éthique médicale et président du Conseil pour l’éthique de la recherche et l’intégrité scientifique à la faculté de médecine de l’université Paris-Saclay, se pose actuellement beaucoup de questions au sujet du sort à réserver aux non-vaccinés en réanimation qui auraient attrapé la Covid. Il va jusqu’à se demander s’il ne faudrait pas prioriser les vaccinés par rapport aux non-vaccinés.

Dans sa tribune intitulée « Covid-19 : serait-il éthique de prioriser en réanimation les vaccinés aux non-vaccinés ? » parue dans le JDD (titres d’œuvre en italique) le 27 décembre 2021, la couleur de ses penchants est immédiatement donnée dans ses questionnements : « Pourrait-on imputer une responsabilité à la personne qui, en toute conscience et dans l’affirmation de sa liberté individuelle, a rejeté l’offre vaccinale, niant a priori tout risque pour sa vie et pour celle d’autrui, au point de lui refuser l’accès à la réanimation ? […] La participation à la solidarité vaccinale ne pourrait-elle pas toutefois constituer un critère d’arbitrage recevable entre deux malades présentant des indications équivalentes à la réanimation ? »

 

Des postulats biaisés

Le postulat de départ d’Emmanuel Hirsch est donc qu’une personne qui refuse de se faire vacciner contre la Covid-19 le fait uniquement pour préserver sa liberté, et qu’elle choisit « en toute conscience » de prendre des risques et d’en faire courir à autrui. Autrement dit, que le non-vacciné est une personne supposée égoïste qui choisit de ne prendre soin ni d’elle-même ni des autres, et que le vaccin, inoffensif, est le seul moyen de prévenir et d’affaiblir la maladie ou de l’empêcher de circuler.

On pourrait avoir envie de cesser immédiatement la lecture de sa démonstration, puisqu’elle démarre sur des suppositions et des affirmations fausses. On sait aujourd’hui qu’une personne ayant reçu des injections anti-Covid encore en essai clinique peut attraper la Covid-19, la transmettre et finir en réanimation. On sait également qu’il existe des effets secondaires indésirables post-vaccinaux graves, comme l’indiquent des sites officiels tel celui de l’ANSM.

D’autres questions éthiques fondamentales non abordées

Si Emmanuel Hirsch souligne bien l’augmentation du nombre de cas actuel et « la fragilisation du système hospitalier », pas un mot sur le fait que les cas positifs ne sont pas forcément des malades, que cette surcharge hospitalière survient chaque hiver depuis des années et ne date pas de la Covid-19. Pas la moindre remise en question du fait que les centres de soin souffrent également du départ forcé des soignants non vaccinés, lesquels avaient déjà traversé plusieurs vagues épidémiques en contact direct avec les malades, parfois sans masque. Pas un mot sur le fait qu’on peut être vacciné, testé positif et aller travailler muni de son pass sanitaire (bientôt vaccinal), mais qu’un soignant testé négatif, non vacciné, n’a plus le droit d’aller au chevet des patients. Pas un mot sur le fait que des médecins clament que des traitements peu onéreux et éprouvés sur leurs patients fonctionnent, que la majorité des gens se remettent spontanément de cette maladie sans aucune aide médicale, et qu’il existe des moyens de développer son système immunitaire.

Doute, mais obéis

Ce professeur d’éthique (et non pas d’épidémiologie, rappelons-le) souligne tout de même que « les mesures sanitaires doivent s’adapter non seulement à l’acquisition de connaissances scientifiques transitoires qui s’établissent et s’éprouvent nécessairement dans l’immédiat, sans recul encore suffisant (rappelons que la mise sur le marché d’un premier vaccin a été autorisée par l’Agence européenne du médicament il y a un an, le 21 décembre 2020) ». Cela ne suffit néanmoins pas à lui faire reconnaître comme acceptable qu’une personne informée puisse douter de l’efficacité et de l’innocuité des injections et les refuser en toute légitimité.

Une bienveillance exigée, mais non incarnée

Au contraire, il va jusqu’à remettre en cause « la bienveillance » de ceux qui refusent la vaccination.

Il affirme que « le principe de liberté vaccinale n’est en soi respectable que si cette dernière s’avère conciliable avec l’attention bienveillante accordée à autrui, et dès lors que sont honorées les exigences de justice et de réciprocité » et il se demande si c’est le cas actuellement de la part « des propagandistes de la liberté de non-vaccination ». Et comble pour lui, aucun de ces derniers « n’a postulé de la reconnaissance de directives anticipées à l’éventualité de ne pas être réanimé consécutive à leur choix. Aucun d’entre eux ne s’est exprimé sur les modalités d’une priorisation en réanimation qui, du fait de leur décision, s’avérerait préjudiciable à une personne vaccinée. »

Où est sa propre bienveillance ? Et que dirait-on si on entendait de la bouche des non-vaccinés qu’il faudrait que les vaccinés renoncent à des soins en cas de problèmes post-vaccinaux et passent après les non-vaccinés puisqu’ils ont choisi de se faire vacciner ?

Responsables et coupables

Emmanuel Hirsch utilise également la technique de la culpabilisation et de la responsabilisation : si l’hôpital va mal aujourd’hui, et s’il y a des personnes fragiles qui meurent de la Covid, ce serait principalement à cause des non-vaccinés. Et pour garantir l’accès aux soins, une seule solution : se faire vacciner.

Il se demande : « Qu’en est-il dans de telles conditions de la fragilisation du système hospitalier, des droits d’autres malades atteints de comorbidités, ainsi soumis, en dépit de leurs besoins et malgré un schéma vaccinal complet, aux effets collatéraux d’une hospitalisation impossible ou d’une déprogrammation de leurs traitements sans autre justification qu’une priorisation des malades de la Covid-19 ? » M. Hirsch considère comme « irrespectueux à l’égard des professionnels – et des personnes particulièrement vulnérables aux risques de contamination (je pense notamment aux personnes immunodéprimées en chimiothérapie) – d’affaiblir, ne serait-ce qu’en soutenant publiquement des positions discutables, la cohésion d’une riposte qui maximise dans l’instant présent l’efficacité d’une prévention vaccinale dont nombre de pays n’ont pas le bénéfice. »

Une victimisation non équitable

La binarité d’Emmanuel Hirsch ne s’arrête pas là : il met en lumière qu’en réanimation, les personnes non vaccinées s’y trouvant pour Covid y sont surreprésentées. Mais aucune phrase et aucun chiffre cité ne sont dédiés aux victimes d’effets post-vaccinaux qui se retrouvent jusque dans les hôpitaux, quand ils ne vont pas directement à la morgue. Aucune question éthique sur le fait qu’il est actuellement difficile de comptabiliser le nombre de ces victimes et que l’imputabilité du vaccin est difficilement démontrable et démontrée.

Il n’évoque que les « “repentis” survivant à une réanimation qu’ils pensaient ne jamais avoir à subir [qui] ont exprimé un sentiment de détresse, voire de culpabilité, et le besoin de témoigner afin de faire la preuve tardive d’une exemplarité dont ils espèrent qu’elle bénéficiera à d’autres ». Pas une ligne pour les personnes qui ont regretté de s’être fait vacciner, ou d’avoir fait vacciner leurs enfants.

Non, seules semblent compter les victimes (vaccinées) touchées par la Covid : « En cette phase de recrudescence de la pandémie et de diffusion du variant Omicron, la pénurie évoquée des capacités d’accueil dans les unités de soins critiques pourrait contraindre à intégrer aux critères médicaux de priorisation ou de triage en réanimation une composante qui heurterait l’éthique médicale : hiérarchiser entre la personne qui a fait le choix de la vaccination et celle qui la refuse ou n’a pas compris sa justification. »

Un garde-fou fragile

Heureusement, Emmanuel Hirsch cite les positions de la Société française d’anesthésie et de réanimation, la SFAR, qui soutient que « chacun est libre d’accepter ou de refuser un traitement. C’est le cas pour la vaccination. Et quand bien même celle-ci deviendrait obligatoire, cela ne justifierait pas non plus de facto de ne pas prendre en charge ceux qui ne respecteraient pas la loi. De nombreuses conduites à risque pèsent sur le système de santé. Pour autant, elles ne sauraient justifier une limitation de l’accès aux soins. »

Mais cet avis en apparence tranché semble fragile : « À gravité égale, la seule raison qui justifierait de retenir la vaccination comme critère médical de priorisation serait que celle-ci donne plus de chance de survie (en termes de quantité de vie et de qualité de vie). À ce jour, il n’existe pas de preuve scientifique solide pour l’affirmer. Au-delà des critères médicaux, une priorisation qui se baserait sur un critère de mérite (les vaccinés seraient plus méritants que les non-vaccinés) sort du champ médical et serait discriminatoire. » Qu’en sera-t-il si un jour les chiffres officiels démontrent qu’une personne vaccinée aura plus de chances de survivre et d’avoir un restant de vie de meilleure qualité qu’une personne non vaccinée ? Et cette analyse sera-t-elle faite en prenant en considération et en mettant dans la balance la quantité et la qualité de vie des personnes victimes d’effets indésirables post-vaccinaux ?

Emmanuel Hirsch conclut : « J’estime que le contexte pandémique, dont on ne maîtrise en rien l’évolutivité, pourrait nous contraindre à la difficile responsabilité de hiérarchiser nos principes éthiques, à titre provisoire et en ayant le souci d’exercer un contrôle sur les modalités d’un arbitrage en situation caractérisée comme exceptionnelle. » Quand on voit combien « l’exceptionnel » perdure et s’installe depuis des mois, il y aurait lieu de s’inquiéter si de telles pratiques advenaient.

 

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