Des accords non respectés avec les pays de l’Est qui embarrassent l’Otan ?
Comme le révèle le magazine allemand Der Spiegel, un document émanant des Archives nationales britanniques confirme la thèse avancée par Moscou de l’existence d’un engagement de Washington et des puissances occidentales à ne pas étendre l’Alliance atlantique vers l’est. Engagement qui n’aurait donc pas été tenu…
Le document, longtemps classé secret défense, prouve qu’en 1991, pour les Britanniques, les Américains, les Allemands et les Français, l’adhésion à l’Otan des pays d’Europe de l’Est était « inacceptable ».
◆ Pourquoi l’Otan ?
L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord est l’organisation politico-militaire mise en place en avril 1949 par les pays signataires du traité de l’Atlantique Nord afin de pouvoir se défendre collectivement.
L’Alliance se crée au début de la guerre froide et plus spécifiquement pendant le blocus de Berlin exercé par les Soviétiques. Elle a pour vocation initiale d’assurer la sécurité de l’Europe occidentale en s’associant avec les États-Unis, afin de se prémunir contre toute tentative expansionniste de l’Union soviétique.
Depuis la dissolution de l’URSS et la fin de la guerre froide en 1991, l’Alliance atlantique s’est maintenue malgré la disparition de sa principale raison d’être initiale. Elle a procédé à son élargissement à d’anciens pays du bloc de l’Est et d’anciennes républiques de l’Union soviétique.
(Image : Élargissement de l’Otan depuis 1949)
◆ De quoi les Russes ont-ils peur ?
Exactement pour la même raison qui a fait que les États-Unis ont refusé catégoriquement que l’URSS installe des missiles à Cuba et puisse menacer le territoire américain, les Russes ne souhaitent pas que les pays frontaliers rejoignent l’Otan. Lors de la chute du régime soviétique, l’assurance avait été donnée à la Russie que les anciens pays de l’Est ne seraient pas intégrés à l’Otan. Pourtant, elle n’a eu de cesse de s’élargir et se rapprocher toujours plus des frontières russes.
◆ Qui ment ?
La Russie affirme depuis des décennies que l’élargissement de l’Otan à l’est est contraire aux engagements pris par l’Occident après la chute du mur de Berlin. « Je voudrais expliquer une fois de plus la logique de notre comportement et de nos propositions : comme on le sait, nous avons reçu des promesses selon lesquelles l’Otan ne déplacerait “pas d’un pouce” ses infrastructures vers l’est, et cela est bien connu », avait déclaré Vladimir Poutine pour justifier ses revendications concernant des « garanties de sécurité », lors d’une conférence de presse, le 1er février 2022. Pourtant, sur son site, l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (Otan) affirme qu’« un tel accord n’a jamais été conclu ».
◆ Un document embarrassant ?
Le document, révélé par le journal Der Spiegel, est un procès-verbal d’une réunion des directeurs politiques des ministères des Affaires étrangères des États-Unis, de la Grande-Bretagne, de la France et de l’Allemagne, tenue à Bonn le 6 mars 1991. Le thème en était « la sécurité en Europe centrale et orientale ». Dans le document, le représentant de l’Allemagne Jürgen Chrobog explique : « Lors des négociations sur la formule 2 + 4, nous avons été clairs : l’Otan ne sera pas étendue de l’autre côté de l’Elbe. Nous ne pouvons donc pas proposer à la Pologne et aux autres d’adhérer à l’Otan. » Pourtant, la Pologne est devenue membre de l’Otan en 1999. Selon le document toujours, le représentant américain Raymond Seitz était d’accord avec Chrobog et a déclaré : « Nous avons clairement assuré à l’Union soviétique, dans les négociations 2 + 4 et autres, que nous n’allons recevoir aucun avantage du retrait des troupes soviétiques de l’Est. L’Otan ne devrait pas s’étendre vers l’est, que ce soit de manière formelle ou informelle. »
◆ Un accord oral ?
Selon l’Occident, il n’y a pas d’accord avec la Russie car il n’y a pas d’écrit juridiquement contraignant qui exclurait l’élargissement de l’Otan. Interrogé par Politifact, Joshua Shifrinson, professeur à l’université de Boston, estime « légitime de dire que les États-Unis ont offert des garanties aux Soviétiques […], mais ce n’est pas la même chose que de dire que l’Otan a proposé un accord ». D’après le journal The Guardian, lorsque le président russe Boris Eltsine a protesté contre l’expansion de l’Otan, l’administration du président Bill Clinton a demandé au ministère allemand des Affaires étrangères d’examiner la question. Celui-ci a indiqué que la plainte était formellement erronée, mais qu’il pouvait comprendre « pourquoi Eltsine pensait que l’Otan s’était engagée à ne pas s’étendre au-delà de ses limites de 1990 ».
Même s’il n’y a pas d’accord écrit, les documents révélés par le journal Der Spiegel montrent une position claire, de tous les partis, sur le sujet de l’expansion de l’Otan vers l’est. Cette dernière était-elle nécessaire ? L’Otan n’a-t-elle pas, également, sa part de responsabilité dans la guerre en Ukraine ?
Image principale par Pixabay
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