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Tests PCR pour la variole du singe : notre échange tourne court avec le laboratoire Roche

Le 25 mai 2022, le laboratoire Roche annonçait qu’il avait développé un test PCR qui détecte la variole du singe, information relayée par bon nombre de médias qui se sont contentés pour la plupart de reprendre les termes du laboratoire. Nous avons cherché à en savoir plus, sans grand succès : notre demande d’interview a été refusée et notre récolte de réponses, infructueuse.

 

Alors que le premier cas de ce qui a été appelé rapidement « épidémie » de la variole du singe a été officiellement détecté le 7 mai 2022 au Royaume-Uni chez un individu rentrant du Nigeria, 18 jours plus tard, le laboratoire suisse Roche et sa filiale TIB Molbiol déclaraient via un communiqué de presse avoir développé 3 kits de détection de la maladie. Intrigués par la rapidité de l’émergence de leur technologie, nous leur avons posé quelques questions pour éclaircir certains points, mais à part faire un copier-coller de leur communiqué de presse, ils ne nous ont guère renseignés.

Diagnostics et traçages en vue ?

Thomas Schinecker, le directeur de la division Diagnostics de Roche s’est réjoui dans le communiqué de presse que le laboratoire Roche ait  « très rapidement développé une nouvelle série de tests pour la détection du virus de la variole simienne et le suivi de sa propagation.  Les outils de diagnostic sont essentiels pour relever les nouveaux défis en matière de santé publique, car ils contribuent aux mesures mises en place, notamment le traçage des chaînes de transmission et les stratégies thérapeutiques. » Trois kits, pour l’instant disponibles seulement à des fins de recherche et pas pour « le grand public », ont été développés.

Le communiqué précise ce que leurs tests peuvent détecter : « Le premier kit LightMix Modular Virus détecte les orthopoxvirus, dont les virus de la variole simienne – sous-types, ou clades, d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale. Le second kit détecte spécifiquement les virus de la variole simienne (clades d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale). Pour les chercheurs souhaitant obtenir ces deux résultats à la fois, un troisième kit est disponible: il détecte les orthopoxvirus tout en précisant si un virus de la variole simienne est présent ou non (clades d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique centrale). »


Nos premières interrogations

Suite à cette annonce, nous leur avons envoyé un message pour leur demander quand précisément ont commencé leurs recherches pour élaborer un test PCR capable de détecter la variole du singe et combien de temps cela a pris en tout pour avoir les trois kits de tests fiables dont ils parlent dans leur communiqué. Qui leur a fourni les virus pour pouvoir travailler dessus et quand. S’ils avaient déjà fait des recherches sur ce virus et la façon de le détecter avant l’apparition officielle de la variole du singe chez l’être humain en Occident en mai 2022, et si oui, quand. S’ils s’étaient inspirés d’autres études réalisées  et si oui, lesquelles. Comment il leur avait été techniquement possible de développer des tests en quelques jours comme ils l’ont fait. Et s’il était possible de nous communiquer le contact du scientifique responsable de l’équipe qui a élaboré les tests pour l’interviewer.

Leur réponse 

Voici leur réponse en ôtant leurs formules de politesse :

« Nous suivons de très près l’évolution des maladies infectieuses potentielles. Il y a quelques semaines, nous avons remarqué un nombre croissant de cas de monkeypox. Dès ce moment, nos équipes de Berlin, Rotkreuz et Pleasanton ont travaillé activement pour développer ces tests. La variole du singe a été détectée pour la première fois chez des singes de laboratoire en 1958. On suppose toutefois que le virus se transmet d’animaux sauvages tels que les rongeurs à l’homme – ou d’homme à homme. Au cours d’une année typique, quelques milliers de cas se produisent en Afrique de l’Ouest et centrale. Mais les cas hors d’Afrique se limitent à une poignée de cas associés à des voyages en Afrique ou à l’importation d’animaux infectés. Les traitements et les vaccins qui ont été développés pour la variole sont disponibles et sont considérés utiles pour limiter la propagation de la variole du singe.

En ce qui concerne votre question sur les échantillons, les types d’échantillons prélevés sur les patients peuvent varier en fonction de la progression de la maladie; l’utilisation d’un écouvillon sur une lésion cutanée (éruption, cloque, papule) représente un type d’échantillon optimal. On peut utiliser aussi bien des écouvillons secs que des écouvillons placés dans un milieu de transport viral (MVT). Une fois l’échantillon prélevé, l’ADN viral doit être extrait à l’aide de méthodes virales/pathogènes (manuelles, semi-automatiques ou automatisées) basées sur les instructions d’utilisation (IFU) disponibles. S’agissant du moyen utilisé pour suspendre l’écouvillon sec avant l’extraction, il faut se reporter au mode d’emploi du kit utilisé pour l’extraction. Nous ne divulguons pas d’informations sur nos recherches.

Quelques informations techniques sur les tests :

Le premier kit LightMix Modular Virus détecte tous les orthopoxvirus, ce qui inclut les virus du monkeypox incluant les formes ouest-africaine et centrafricaine du virus (appelées clades). Le second kit est un test spécifique détectant uniquement les virus du monkeypox (clades ouest-africain et centrafricain). Pour les chercheurs souhaitant obtenir ces deux résultats, il existe un troisième kit qui détecte simultanément les orthopoxvirus et fournit des informations sur la présence ou non d’un virus du monkeypox (clades ouest-africain et centrafricain). Les kits de test peuvent être commandés dans la majorité des pays du monde pour les sciences de la vie uniquement.

Nous vous prions de bien vouloir nous excuser de ne pas vous proposer d’interviews à ce sujet. »

Nos questionnements suite à leur réponse

Après avoir noté qu’aucune de nos questions n’avait obtenu de réponse, nous avons renvoyé une deuxième liste d’interrogations. Nous leur avons fait remarquer que dans leur email,  ils « supposaient » que « le virus se transmettait d’animaux sauvages tels que les rongeurs à l’homme – ou d’homme à homme », alors que dans leur communiqué de presse, ils l’affirmaient. Nous leur avons donc demandé quelle était la bonne version à garder et diffuser : l’affirmation, ou la supposition, et à partir de quels arguments scientifiques on pouvait affirmer ou supposer que les animaux tels que des rongeurs peuvent transmettre le virus.

Suite au fait que tout le monde, eux y-compris, relaient que le virus du singe a été détecté dans un laboratoire en 1958, nous leur avons demandé de nous préciser dans quel laboratoire plus précisément, quelles études y étaient à l’époque réalisées sur les macaques infectés et par qui. Et s’ils n’avaient  pas la réponse à cette question,  de nous communiquer la source dont  ils s’étaient inspirés pour relayer une telle information dans leur communiqué de presse.

Botteront-ils à nouveau en touche ?

 

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Image principale par analogicus de Pixabay

 

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