Tout est bon dans le grillon ?
La poudre de grillon sera bientôt dans nos assiettes. Une alternative alimentaire idéale pour notre santé et notre environnement. Vraiment ?
Après les bovins, c’est à notre tour. Le règlement d’exécution de la commission du 3 janvier 2023 autorise la mise sur le marché de la poudre de grillons domestiques, Acheta domesticus, de la société Cricket One. Assurer à long terme un apport protéique aux 8 milliards d’êtres humains, oui. Mais à quel prix ?
On le lit partout, et ça résonne comme une bonne nouvelle. On ne mangera pas d’insectes sans le savoir. Une fois dans les rayons de supermarchés, les produits seront clairement étiquetés. À la bonne heure ! Du côté de la Commission européenne, on nous assure que les nouveaux aliments ne présentent aucun risque pour la santé humaine.
◆ « Un nouvel aliment » responsable. Est-ce si sûr ?
Oui. Mais à la condition que son élevage soit correctement maîtrisé. Et si l’élevage de vers de farine requiert moins d’eau, et que sa production de gaz à effet de serre est plus faible que pour l’élevage de bétail conventionnel, tout reste encore à démontrer.
C’est le lot de toute ressource : épuisable et donc fragile. Et si les insectes comptent des millions d’espèces, ils ne sont pas moins menacés. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) alerte sur la « surexploitation des insectes », menaçante pour « la biodiversité et la stabilité de l’écosystème dans la zone si des contrôles ne sont pas mis en place par le biais de réglementations et de mesures d’application ».
◆ Des allergènes dans le substrat
La Commission européenne nous l’assure, « les nouveaux aliments ne peuvent être autorisés que s’ils ne présentent aucun risque pour la santé humaine ». Les insectes constituent « une source alimentaire saine et nutritive, à forte teneur en matières grasses, en protéines, en vitamines, en fibres et en minéraux ».
Mais le règlement d’exécution 2023/5 de la Commission du 3 janvier 2023 note qu’en dehors des « réactions allergiques chez les personnes allergiques aux crustacés », d’autres allergènes peuvent apparaître dans le nouvel aliment, « si ces allergènes sont présents dans le substrat avec lequel sont nourris les insectes ». Juillet 2021 : dans un communiqué dédié aux protéines animales dans l’alimentation des porcs et des volailles, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) rappelait que les insectes pouvaient transférer des « microorganismes pathogènes et des contaminants chimiques ».
◆ Des insectes nourris avec quoi ?
Pour l’élevage des insectes destinés à l’alimentation des animaux, l’Anses recommande de respecter les règles sanitaires : « La source de nourriture des insectes doit respecter la réglementation en vigueur pour l’alimentation des animaux d’élevage. Cela signifie qu’ils ne doivent pas être nourris de déchets ni de déjections, sources importantes de contaminations microbiennes.
De même, les insectes doivent être complètement débarrassés du substrat sur lequel ils sont élevés avant de débuter le processus de transformation en PAT*. » Elle ajoute qu’une période de jeûne de 24 heures permettrait d’éliminer les éventuels contaminants susceptibles d’être présents dans l’intestin des insectes.
Introduire ce nouvel aliment dans nos assiettes et troquer ponctuellement son entrecôte contre une poêlée de criquets migrateurs, pourquoi pas. Mais l’idée d’une poudre d’insecte répandue dans la pâte à cookie, c’est tout autre chose. Et si l’on en croit le règlement 1169 /2011 qui impose un étiquetage « loyal et précis », heureux celui qui parviendra encore à en déchiffrer les termes. Le potentiel élevage massif auquel on nous prépare peut-il rimer avec une consommation responsable ? Sans la jouer alarmiste, on attend de voir.
* Protéines animales transformées
Article par Diane O.
Image principale : Sadiak123 via Pixabay
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