Covid-19 et statistiques : une surmortalité relative ?
Cela n’est un secret pour personne : la population française s’accroit et vieillit. Il est donc logique que le nombre de décès augmente. Si tout le monde s’entend pour dire qu’il n’y a pas eu de surmortalité chez les moins de 65 ans en 2020 due à la COVID-19, pour les plus de 65 ans, il existe plusieurs versions et interprétations des chiffres, selon la méthode et la période de calculs.
◆ La population française vieillit et s’accroît
On peut constater un pourcentage et un nombre de personnes âgées de plus en plus important parmi la population française. Le site de l’Insee l’explique en ces termes : « Au 1er janvier 2018, la France compte 67,187 millions d’habitants. Le vieillissement de la population française se poursuit. Les personnes âgées d’au moins 65 ans représentent 19,6 % de la population, contre 19,2 % un an auparavant et 18,8 % deux ans auparavant. Leur part a progressé de 4,1 points en vingt ans. La hausse est de 2,4 points sur la même période pour les habitants âgés de 75 ans ou plus, qui représentent près d’un habitant sur dix au 1er janvier 2018. (…) Jusqu’en 2040, la proportion des personnes de 65 ans ou plus progresserait fortement : à cette date, environ un habitant sur quatre aurait 65 ans ou plus. Cette forte augmentation est inéluctable et correspond à l’arrivée dans cette classe d’ âges de toutes les générations issues du baby-boom. Après 2040, la part des 65 ans ou plus continuerait à progresser mais plus modérément. En 2070, la France compterait plus d’une personne âgée de 65 ans ou plus pour deux personnes âgées de 20 à 64 ans. » LCI évoque le fait qu’un article de 2016 écrit par Gilles Pison et Laurent Toulemon intitulé « Le nombre de décès va augmenter en France dans les prochaines années. Population et Sociétés n° 531, mars 2016″ » parlait déjà d’une hausse probable des décès à venir pour les 70 ans et plus.
◆ Une épidémie comparable avec d’autres ?
Le Professeur Raoult, dans une interview sur BFMTV du 16 avril 2021, répond au journaliste qui lui demande où est-ce qu’il situe l’épidémie du COVID avec un bilan officiel de 100000 morts (depuis le 21 décembre 2019, et pas depuis le début de l’année, rappelons-le) dans la liste des épidémies depuis un siècle : « On ne peut pas comparer ces choses-là, car nous n’avons jamais eu dans l’Histoire de l’humanité une population qui ait eu cet âge, une proportion de population qui ait eu un âge pareil. Vous vous rendez compte que l’âge moyen des gens qui sont morts ici » (à l’IHU de Marseille) c’est 81 ans. (…) Nous avons maintenant une population d’une très grande fragilité, qui est susceptible de mourir avec des infections relativement peu graves pour des gens qui n’ont pas des facteurs de risques importants, et bien entendu, ça ne va pas s’arrêter, parce que cette population, nous l’avons. (…) Ça n’a rien à voir avec la grippe espagnole. La spécificité de la grippe espagnole, ça tuait des gens jeunes. »
◆ Un taux de surmortalité logiquement grandissant
Une hausse du nombre de décès et du pourcentage de décès parmi la population globale est donc à prévoir dans tous les cas dans les années à venir, et à prendre en considération pour évaluer le taux de surmortalité annuel. Car plus il y aura d’êtres humains vivants sur cette planète, et en l’occurrence plus d’être vivants âgés, plus il y aura de morts, la mort faisant partie de la vie, surtout lorsqu’on vieillit. Il ne pourrait en être autrement, à moins d’augmenter encore l’espérance de vie en bonne santé, ou encore de ralentir ou d’arrêter le vieillissement. Calculer le taux de mortalité spécifique selon l’âge, qui est le « nombre de décès dans un groupe d’âge pendant l’année par rapport à la population dans ce groupe d’âge », comme indiqué sur le site de Santé Publique France, est donc nécessaire pour comparer les taux de mortalité d’une année sur l’autre, et non pas seulement le nombre de décès. Comparer seulement des données en numéraire, et pas en pourcentage de la population apparaît, donc comme incomplet pour établir un diagnostic rationnel comme le fait par exemple le site de l’IFRAP, Think tank dédié à l’analyse des politiques publiques, lequel nous indique qu’en 2020, « Un regard sur les données cumulées montre qu’au 30 avril la surmortalité par rapport à la moyenne (2018-19) est de 27 335 personnes. (…) En revanche, la surmortalité depuis le 1er septembre est beaucoup moins importante. Du 1er septembre au 19 octobre elle s’élève à 3 983 personnes ».
◆ De la « sous-mortalité » chez les moins de 65 ans en 2020
Certains ont déjà ce genre de calcul pour évaluer ce taux de mortalité spécifique selon l’âge, comme par exemple le Professeur Toubiana, épidémiologiste et diplômé en démographie, dans une étude qu’il a évoquée notamment au micro de Sud Radio le 26 mars 2021, et publiée sur le site de l’Irsan, Institut de recherche pour la valorisation des données de santé, intitulée « L’épidémie de Covid-19 a eu un impact relativement faible sur la mortalité en France ». Le constat de ses collègues et lui-même est clair : en 2020, il n’y a pas eu de surmortalité chez les moins de 65 ans toutes causes de décès confondues, mais bel et bien une part moindre qui est passée de vie à trépas parmi cette population par rapport aux années précédentes. Leur conclusion : « L’année 2020 n’a connu aucune surmortalité (voire une sous–mortalité) chez les personnes âgées de moins de 65 ans(qui représentent environ 80% de la population totale). Seuls les âges les plus avancés ont connu une surmortalité. La surmortalité maximale est atteinte par la classe d’âge 70–74 ans avec 3 109 décès en excès par rapport aux 58 327 attendus pour cette classe d’âge (soit 5,58%). Au passage de l’épidémie de Covid–19, pour la population française dans son ensemble, les auteurs estiment à 3,66%, l’excès par rapport à la mortalité attendue en 2020. »
Le journal Le Monde le confirme : « L’étude de M. Toubiana affirme que l’épidémie n’a pas eu d’effet sur le nombre de décès chez les moins de 65 ans. C’est vrai. L’Insee en faisait déjà part à la mi-janvier 2021 ; la surmortalité est de + 2 % pour les 50-64 ans, mais de – 1 % pour les 25-49 ans et même de – 6 % pour les moins de 25 ans. Un phénomène qui s’explique à la fois par la faible létalité du Covid-19 chez les populations jeunes, mais aussi par la chute des autres causes de décès comme les morts sur la route, en baisse de 21,4 % par rapport à 2019, selon les chiffres du ministère de l’intérieur. »
◆ Un taux de surmortalité chez les plus de 65 ans qui fait polémique
En revanche, l’étude de M Toubiana relève une surmortalité pour les plus de 65 ans de 3,66% annoncés pendant l’émission. Chiffre critiqué par Le Monde, notamment en mettant en lumière que l’étude réalisée par Laurent Toubiana et ses collègues n’a pas été « évaluée par ses pairs, étape indispensable pour pouvoir parler de “publication scientifique” ». Un autre argument utilisé par Le Monde est que « Le mode de calcul retenu par cette étude minimise l’impact de l’épidémie. Selon l’Insee, qui prend un autre point de comparaison (en l’occurrence, l’année 2019), la surmortalité globale en 2020 a été de 9 %. Laurent Toubiana a préféré quant à lui comparer les données de 2020 à celles des trois dernières années, plutôt qu’à celles de 2019 uniquement. » L’article du Monde rapporte aussi que M Toubiana se demandait où étaient les 500000 morts annoncés par certaines modélisations, et trouvait les mesures disproportionnées par rapport au nombre de victimes, bien moindre que celui annoncé, en oubliant le fait que « ce scénario ne s’est pas produit, puisque, justement, deux confinements ont été mis en place (au printemps puis à l’automne 2020), empêchant de mesurer la précision de ces prédictions. »
Quand on la regarde d’un peu plus près, on peut lire que l’étude de l’Insee mentionne que « Au total sur l’année, les décès de personnes de plus de 70 ans ont augmenté de 52 100. Malgré cette hausse, la structure des décès est peu modifiée. 79 % des personnes décédées en 2020 ont plus de 70 ans, contre 78 % en 2019 ; près de la moitié ont 85 ans ou plus en 2020 comme en 2019. (…) En 2020, 668 800 décès sont survenus toutes causes confondues, soit 55 500 de plus qu’en 2019 (+ 9,1 %). En raison de l’arrivée des générations nombreuses du baby-boom à des âges où la mortalité est plus élevée, le nombre de décès augmente chaque année depuis 2010. La hausse observée en 2020 est cependant sans commune mesure avec celle des années passées. À espérance de vie constante depuis 2019, l’augmentation de la population et son vieillissement en 2020 auraient entraîné un accroissement des décès d’environ 14 000. » Bilan de l’Insee : « L’essentiel de la hausse des décès en 2020 est donc porté par l’augmentation des taux de mortalité aux âges élevés du fait de l’épidémie de Covid-19. »
◆ Des questions qui émergent
On peut déjà opposer aux arguments soulevés par Le Monde le fait que le taux de mortalité dans un pays qui n’a pas confiné sa population comme la Suède y est plus bas qu’en France. On peut aussi se demander pourquoi il n’a pas été demandé à l’Inserm si et quand cette étude de M Toubiana sera évaluée par ses pairs, afin d’en déterminer la justesse ou non par des spécialistes, plus à-même que nous de les décortiquer ? On peut aussi souligner que le taux de 9% de l’Insee évoqué par Le Monde est celui de la surmortalité globale parmi toute la population et pas seulement chez les plus de 65 ans, et que ce pourcentage semble être tiré du nombre de morts (55500 morts de plus qu’en 2019), pas du pourcentage de morts parmi la population, ce qui ne permet pas de comparer ce qui est comparable. On peut se demander en quoi la méthode de l’Insee serait-elle plus légitime que celle de M Toubiana qualifié de se rapprocher des « rassuristes » : en effet, pourquoi comparer les données de 2020 avec celles de 2019 seulement, plutôt qu’avec celles des trois dernières années, permettrait-il de mieux évaluer la surmortalité d’une population ? Pourquoi préfèrerait-on garder comme référence une étude comparative avec l’année précédente seulement indiquant un taux de surmortalité global de 9%, qu’une étude comparative sur les trois dernières années indiquant qu’il y a eu 3,66% de surmortalité chez les plus de 65 ans ?
◆ Opposer les « rassuristes », et les « alarmistes », une façon sage et utile d’aborder les choses ?
On reproche à M Toubiana de minimiser l’impact de l’épidémie. Mais en partant de ce type de raisonnement, ne pourrait-on pas dire par effet miroir que celle de l’Insee la maximise en mettant en avant dès ses premières lignes l’augmentation du nombre de morts, pas les taux de mortalité selon l’âge ? N’y aurait-il pas un juste milieu à atteindre entre ces deux études ? Et pourquoi les opposer au final, se contredisent-elles vraiment ? Si les études avaient les mêmes méthodes de calculs, sur la même période, arriveraient-elles aux mêmes résultats ? Et que ce soit en prenant en compte l’une ou l’autre de ces études, peut-on parler sanitairement d’hécatombe qui justifie les mesures liberticides actuelles ?
◆ Voir plus loin pour un meilleur angle ?
Remonter plus loin en arrière que 2019 permettrait peut-être de confirmer par un organisme officiel ce qu’un statisticien démontre sur sa chaîne Youtube Décoder l’info à partir des données de l’Insee âge par âge entre 2017 et 2020 dans une de ses vidéos intitulée « Grippe VS Covid, qui est vraiment le plus mortel ? » : que « la grippe de 2017 a été en fait beaucoup plus mortelle que l’épidémie de COVID-19. La grippe, c’est donc bien plus dangereux pour les anciens que l’épidémie de COVID-19. Et donc la seule raison pour laquelle nous avons plus de décès pendant l’épidémie de COVID-19 que pendant la grippe 2017, c’est parce qu’en 2020, nous avons plus de personnes de 65 ans et plus qu’en 2017. (…) Pour vérifier qui est vraiment le plus mortel, je prends les taux de mortalité que j’ai pendant la grippe 2017 et je les applique à la population de 2020. Ça me donne un résultat théorique, comme si la grippe de 2017 était finalement arrivée trois ans plus tard en 2020. On continue de découvrir avec stupeur qu’à presque n’importe quel âge, la grippe de 2017 aurait fait plus de morts que la COVID-19 si elle avait eu lieu sur la population française de 2020. Finalement, la grippe de 2017 aurait fait 8500 décès de plus que la COVID-19 si elle était survenue l’hiver dernier » .
◆ La nébulosité du nombre de décès dus à la COVID-19
Pour pouvoir évaluer un vrai taux de surmortalité, encore faudrait-il être certains que les 100000 décès attribués à la COVID-19 (depuis le 31 décembre 2019, donc pas sur un an, mais sur un an et un peu plus de quatre mois au 18 avril 2021) aient bien été causés dans tous les cas par la COVID-19. Le rapport de Santé Publique France à ce sujet pose question. (Lire notre article Nombre de décès dus à la COVID-19 : notre courrier à Santé Publique France) L’étude de M Toubiana et ses collègues souligne « Dans son Bulletin d’information du 18 mars 2021, SPF indique ainsi avoir reçu, entre le 1er mars 2020 et le 15 mars 2021, 39 568 certificats contenant une mention de Covid–19 parmi les causes médicales de décès renseignées. Toutefois, les certificats de décès mentionnent généralement plusieurs causes, qu’elles soient mises sur le même plan, ou hiérarchisées en une cause « initiale » et des causes « associées ». Dans le cas des décès classés «Covid–19», dans 65 % des cas (soit plus de deux tiers des situations), les certificats révèlent la présence de comorbidités importantes connues (pathologies cardiaques, hypertension artérielle, diabète sévère, pathologies rénales et respiratoires, etc.). La présence de ces comorbidités induit un facteur de confusion ne permettant pas de différencier les décès. » Et comment peut-on être sûrs qu’il y ait une baisse aussi grande de décès dus à la grippe ? (4000 morts selon l’Insee).
◆ Des critiques sans fond qui font dispersion
Ne serait-ce pas plus intéressant et utile pour la santé publique de tenter de trouver la réponse à ces interrogations, d’en débattre scientifiquement et publiquement, avec patience et transparence, plutôt qu’afficher comme l’a fait Conspiracy Watch, que M Toubiana a participé au film Hold-Up, sans évoquer les arguments de fonds qu’il y a déclarés ?
C’est ce que nous comptons faire dans les jours à venir, à notre échelle et à notre mesure. En allant dans la direction que M Toubiana aurait aimé que les gouvernants prennent en matière sanitaire : « En général pour un évènement comme ça, il faut prendre des avis très diversifiés. Celui qui doit décider doit faire ça. Apparemment, là les avis ont été pris dans une certaine direction. On a éliminé ceux qui pouvaient penser différemment, c’est dommage. On va essayer de rétablir l’équilibre. »
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