News

Hydroxychloroquine : l’étude frauduleuse de janvier enfin rétractée, mais le Pr Raoult de nouveau attaqué

La guerre autour de l’hydroxychloroquine n’est toujours pas terminée. Alors que l’étude publiée en janvier 2024 par la revue Biomedicine & Pharmacotherapy vient d’être rétractée par l’éditeur en raison de ses données et de ses conclusions non fiables, le Pr Raoult est de nouveau attaqué pour une étude qu’il a publiée récemment et qui montre l’efficacité de l’hydroxychloroquine dans le traitement du Covid.

◆ Une rétractation tardive

Il aura fallu 13 jours à la revue The Lancet pour rétracter l’étude frauduleuse qu’elle avait publiée en mai 2020 sur l’hydroxychloroquine et dont le seul but était, à l’évidence, de jeter le discrédit sur les bénéfices de cette molécule dans le traitement du Covid-19. Il aura fallu attendre plus de sept mois pour que la revue Biomedicine & Pharmacotherapy fasse de même avec l’étude qu’elle a publiée le 2 janvier 2024, intitulée (en français) « Décès induits par une utilisation compassionnelle de l’hydroxychloroquine pendant la première vague de Covid-19 : une estimation » et pilotée par un médecin et chercheur lyonnais, le Pr Jean-Christophe Lega.

◆ Une étude contestée dès sa publication

Cette méta-analyse rétrospective s’appuyait sur 44 études pour conclure que l’administration d’hydroxychloroquine pendant la première vague de Covid-19, au printemps 2020, était impliquée dans près de 17 000 décès en France, en Belgique, en Italie, en Espagne, en Turquie et aux États-Unis.

Dès sa publication, plusieurs voix s’étaient élevées pour contester la fiabilité des données utilisées dans cette étude, les différences dans les dosages employés et les extrapolations aberrantes faites par les modélisateurs.

⇒ Lire notre article du 15 janvier 2024 :

etude foireuse anti-hydroxicloroquine

◆ Des données non fiables et une hypothèse incorrecte

La rétractation a eu lieu le 26 août dernier. En commentaire, l’éditeur en chef indique que « la décision de rétractation a été prise en raison de deux questions majeures : 1/ La fiabilité des données et le choix des données. L’ensemble de données belges en particulier a été jugé non fiable et basé sur des estimations. 2/ L’hypothèse selon laquelle tous les patients entrant dans la clinique étaient traités pharmacologiquement de la même manière était incorrecte. » En raison de ces deux points, l’éditeur a estimé que « les conclusions de l’article n’étaient pas fiables et que l’article devait donc être rétracté. »

◆ L’aberration des études choisies pour la méta-analyse

Pour plus de détails sur les critiques envoyées à l’éditeur par plusieurs médecins et scientifiques, on peut lire le long fil publié le 27 août dernier par le Dr Véronique Baudoux sur son compte X. En plus des erreurs de données, elle montre que sur les douze études italiennes retenues pour la méta-analyse, une seule évalue véritablement l’effet de l’hydroxychloroquine sur les patients hospitalisés pour cause de Covid. Et celle-ci conclut à une diminution de 30 % de la mortalité dans le groupe de patients traités et non à une surmortalité.

Quant aux autres études utilisées par les auteurs, elles n’ont rien à voir avec l’hydroxychloroquine : une évalue l’impact de la prise de statines sur la maladie, une autre l’impact de traitements anticoagulants, une autre encore s’intéresse à la mortalité Covid chez les patients transplantés, etc.

◆ Une rétractation suite à des pressions ?

Alors que de nombreux médias s’étaient empressés de relayer les conclusions de cette méta-analyse au moment de sa sortie, en janvier 2024, il est intéressant de constater que peu se font aujourd’hui l’écho de sa rétractation. Les quelque rares qui s’y attellent, comme L’Express, Libération ou Le Progrès, vont dans le sens d’une rétractation injustifiée, décidée sous la pression suite à une « campagne de dénigrement » (Libération), voire de « harcèlement sur les réseaux sociaux et par mail » (Le Progrès).

Xavier Azalbert, le patron de France-Soir et l’un des détracteurs de cette étude, a donc décidé de poser la question à la rédactrice en chef de Biomedicine & Pharmacotherapy (Danyelle M. Townsend) et à l’éditeur de l’article (Elsevier). Selon lui, les deux lui auraient confirmé par mail avoir suivi « la procédure [de rétractation] appropriée » et « n’avoir fait l’objet d’aucune pression », ni d’aucun harcèlement.

◆ Une sénatrice dénonce le « manque de transparence des auteurs »

La sénatrice du Bas-Rhin Laurence Muller-Bronn (LR) a décidé pour sa part d’interpeller la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Dans une alerte rédigée le 3 septembre dernier, elle porte à son attention le fait que « les auteurs de cette étude ont été sollicités par plusieurs chercheurs afin qu’ils mettent à disposition leurs données, en application de la Charte de Singapour sur l’éthique de la recherche. Or, ces derniers n’ont pas répondu aux demandes des chercheurs, attestant d’un manque de transparence des auteurs. »

◆ Le silence des médias de service public

La sénatrice ajoute que, cette étude « ayant été largement relayée dans les médias, notamment de service public » à sa sortie, suite à sa rétractation, « il paraît indispensable qu’un rétablissement des faits et informations à son sujet soit communiqué au grand public par ces mêmes médias ». Or, souligne l’élue du Bas-Rhin, « si des articles ont été publiés à ce jour par des médias de service public en Belgique et en Suisse, en France, aucun média n’a apporté le démenti qui s’impose ». Notons que c’est toujours le cas au moment où nous écrivons ces lignes.

◆ Reprise des hostilités contre le Pr Raoult

Mais une actualité chasse l’autre et les médias viennent de trouver bien plus croustillant à se mettre sous la dent concernant l’hydroxychloroquine : « L’IHU et l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille dénoncent aux autorités sanitaires les dernières recherches jugées illégales du Pr Raoult », a annoncé en exclusivité Le Point ce jeudi 5 septembre.

Tiens, comme c’est étrange ! À peine une étude torpillant l’hydroxychloroquine est-elle rétractée, qu’une autre démontrant son efficacité est attaquée ! Cette dernière, cosignée par Didier Raoult et Philippe Brouqui, son ancien bras droit à l’IHU-Méditerranée Infection, est parue en juillet 2024 dans la revue Acta Scientific Microbiology. L’APHM et la Fondation Méditerranée Infection, qui chapeaute l’IHU, ont décidé de signaler cette publication à l’Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) en raison de « l’utilisation de données de patients et de recherches non autorisées ».

◆ Des médias cette fois-ci prompts à relayer

Encore une fois, le Pr Raoult est accusé d’avoir mené des essais cliniques « sauvages ». Voilà un sujet bien plus conforme à la propagande habituelle autour de l’hydroxychloroquine et de son sulfureux défenseur ! Rien d’étonnant donc à ce que cette information ait été cette fois-ci immédiatement reprise par l’Agence France-Presse et relayée par la plupart des médias, y compris ceux de service public.

Article par Alexandra Joutel

⇔ CHER LECTEUR, L’INFO INDÉPENDANTE A BESOIN DE VOUS !

Nexus ne bénéficie d’aucune subvention publique ou privée, et ne dépend d’aucune pub.
L’information que nous diffusons existe grâce à nos lecteurs, abonnés, ou donateurs.

Pour nous soutenir :

1️⃣ Abonnez-vous
2️⃣ Offrez Nexus
3️⃣ Commandez à l’unité
4️⃣ Faites un don sur TIPEEE ou sur PAYPAL

Découvrez notre dernier numéro

Et gardons le contact :

Retrouvez-nous sur réseaux sociaux
Inscrivez-vous à notre newsletter

Sur le même thème