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Vaccins anti-Covid : le nouveau contrat opaque passé par la Commission européenne avec Moderna

En janvier 2024, l’eurodéputée Virginie Joron (RN) avait découvert que la Commission européenne avait lancé un appel d’offres pour l’achat de 146 millions de doses supplémentaires de vaccin anti-Covid. Un an plus tard, cet appel d’offres a abouti à la signature, vendredi, d’un contrat d’achat groupé pour 17 pays avec le laboratoire Moderna. Mais, comme pour les précédents contrats, la transparence n’est toujours pas au rendez-vous.

◆ Jusqu’à 146 millions de doses sur quatre ans

Eh non, le sujet de la vaccination contre le Covid n’est toujours pas terminé ! Vendredi dernier, l’Autorité de préparation et de réaction en cas d’urgence sanitaire (HERA) de la Commission européenne a annoncé la signature d’un contrat-cadre de passation conjointe de marché permettant à 17 pays européens, dont 15 États membres, d’acheter jusqu’à 146 millions de doses de vaccin supplémentaires au laboratoire pharmaceutique Moderna.

Ces commandes pourront s’effectuer en fonction des besoins nationaux de chaque pays participant, sans quantité minimale fixée, et ce pendant une durée de quatre ans.

Les pays participants sont : la Belgique, Chypre, la Croatie, le Danemark, l’Espagne, l’Estonie, la Finlande, la France, la Grèce, l’Irlande, le Luxembourg, la Macédoine du Nord, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, la Suède et la Slovénie. Curieusement, l’Allemagne et l’Italie, soit deux des plus gros pays de l’UE, en sont absentes.

◆ Renforcer la préparation des pays à une nouvelle pandémie ?

Selon la Commission européenne, ce contrat « garantit la sécurité de l’approvisionnement et renforce la préparation des pays participants à la crise sanitaire, comme c’était le cas pendant la pandémie de Covid-19. ». Est-on en train de nous annoncer, entre les lignes, la survenue d’une prochaine pandémie de Covid ? Sinon, pourquoi anticiper l’achat de doses supplémentaires de vaccins ?

Par ailleurs, sur quoi repose ce chiffre de 146 millions de doses ? Comment a-t-il été calculé ? À quoi correspond-il quant aux populations ciblées, sachant que l’ensemble des pays participants représentent une population de près de 238 millions de personnes ? Quelle est la stratégie ? On ne sait pas.

◆ Des vaccins jugés pratiques, mais aux effets secondaires non évoqués

« Bien que des vaccins soient déjà disponibles, ce contrat facilite l’accès à un vaccin qui offre des conditions de transport et d’entreposage faciles », poursuit le communiqué, qui ajoute que « cela pourrait être particulièrement pertinent en période d’urgence, car il peut être conservé à des températures de congélation régulières. »

« En outre, apprend-on, les pays participants disposeront de seringues préremplies, qui faciliteront l’administration du vaccin et pourront assurer une campagne de vaccination plus rapide. » Tout est donc prévu dans les moindres détails pour réussir, si nécessaire, une campagne de vaccination de masse efficace.

En revanche, aucune mention n’est faite des risques d’effets secondaires liés à ces vaccins. Le Spikevax de Moderna a pourtant été très tôt considéré comme plus à risques que le Comirnaty de Pfizer, tous deux étant des vaccins à ARN messager.

◆ Un appel d’offres lancé il y a un an

La seule, à notre connaissance, qui avait alerté bien en amont sur ce projet d’achat de nouvelles doses de vaccin est la députée européenne Virginie Joron (RN). Dès le mois de janvier 2024, elle avait en effet signalé, lors d’une commission mixte du Contrôle du budget et du Marché intérieur et de la protection des consommateurs, qu’un nouvel appel d’offres venait d’être lancé par HERA pour l’achat de 146 millions de doses supplémentaires.

Lire notre article du 06/02/2024 :

vaccins covid prix inconnus

◆ Des soumissionnaires choisis à discrétion et des prix gardés secrets

Dans cet appel d’offres, il était stipulé que seules les entreprises invitées pourraient postuler et que les prix négociés seraient gardés secrets, tout comme ils l’ont été pour l’ensemble des contrats d’achat des vaccins anti-Covid passés en 2020 et 2021. Cette opacité n’a cessé d’être dénoncée par plusieurs eurodéputés, sans aucun résultat.

« Comment les auditeurs de la Cour européenne des comptes peuvent-ils auditer les transactions financières européennes de tous ces marchés […], si les prix sont gardés secrets et si des communications secrètes ont lieu avec certains soumissionnaires ? » avait de nouveau fait remarquer Virginie Joron à la représentante de la Commission européenne présente à la commission du Contrôle du budget de janvier 2024.

◆ De nombreuses irrégularités déjà constatées sur les précédents contrats

Rappelons qu’à ce manque de transparence des contrats s’ajoute l’affaire des SMS échangés en secret entre la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, et le PDG de Pfizer, Albert Bourla, pour négocier le prix d’achat des vaccins Pfizer (avec un prix passé de 15,50 € à 19,50 € pour 1,8 milliard de doses, soit un contrat à plus de 35 milliards d’euros). Cette affaire, révélée par le New York Times en avril 2021, a créé une vive polémique et engendré plusieurs recours en justice pour obtenir le contenu de ces SMS. Pour l’instant, en vain.

Même la Cour des comptes européenne a souligné dans son rapport de septembre 2022 de nombreuses irrégularités concernant la négociation des contrats d’achat des vaccins.

◆ Le parquet européen mène-t-il vraiment l’enquête ?

Suite à cela, le parquet européen a ouvert une enquête en octobre 2022, toujours en cours. Mais cette nouvelle instance supranationale, opérationnelle depuis juin 2021, est-elle vraiment neutre et digne de confiance ? On peut en douter à la façon dont elle a tout mis en œuvre pour court-circuiter l’action judiciaire engagée par le Belge Frédéric Baldan, débouté la semaine dernière de sa plainte contre Ursula von der Leyen. La présidente de la Commission européenne était notamment poursuivie pour prise illégale d’intérêts et corruption.

Lire notre article du 27/05/2024 :

◆ À quand une réelle transparence dans les marchés publics de l’UE ?

La situation ne semble guère plus claire aujourd’hui concernant le nouveau contrat passé avec Moderna. Une fois de plus, la Commission européenne a agi seule dans son coin pour lancer son appel d’offres, choisir à sa guise les soumissionnaires et négocier un prix qui sera tenu secret.

En 2014, la réforme des directives de l’UE sur la passation des marchés publics visait pourtant à améliorer la transparence et à lutter contre la corruption. Des intentions manifestement non suivies d’effets.

Article par Alexandra Joutel

(Image par Mufid Majnun de Pixabay)

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