Variole simienne : le plus haut niveau d’alerte mondiale est déclenché par l’OMS
C’est reparti comme en juillet 2022. L’OMS, suite à la consultation du comité d’urgence réuni ce mercredi 14 août, le directeur général de l’organisation internationale, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a déclenché le plus haut niveau d’alerte mondiale face à la circulation d’une nouvelle souche du virus de la variole du singe, à ce jour circonscrite à l’Afrique centrale. Une vaccination massive dans les zones touchées semble engagée. De quoi laisser présager bientôt des mesures sanitaires à portée internationale ?
◆ Alerte internationale lancée
Si certains refusent de qualifier cette attribution de plein pouvoir, actuellement, seul le chef de l’OMS peut lancer l’urgence de santé publique de portée internationale, sur les conseils d’un comité d’experts. Le 14 août 2024, le comité constitué de 15 experts s’est réuni à la demande du directeur général de l’OMS pour évaluer la situation concernant la variole du singe (appelée aussi Mpox, monkeypox ou variole simienne). Ils ont estimé que les critères étaient réunis pour déclarer une urgence de santé publique internationale. Et ce à l’unanimité, selon Dimie Ogoina, le président du groupe d’experts.
« Le comité d’urgence s’est réuni et m’a fait savoir qu’à son avis, la situation constitue une urgence de santé publique de portée internationale. J’ai accepté cet avis », a déclaré Tedros Adhanom Ghebreyesus pendant une conférence de presse.
Autrement dit, il s’agit de la plus haute alerte que l’organisation puisse déclencher qui devrait avoir des conséquences organisationnelles à portée internationale. Le directeur général de l’OMS a ajouté que son organisation « s’engage, dans les jours et les semaines à venir, à coordonner la riposte mondiale, en collaborant étroitement avec chacun des pays touchés et en tirant parti de sa présence sur le terrain. » Et ce « afin de prévenir la transmission, de traiter les personnes infectées et de sauver des vies ».
⇒ Lire notre article du 25 mai 2022 :
◆ Des chiffres actuels alarmants ?
Si Tedros Adhanom Ghebreyesus pense que c’est une « une situation qui devrait tous nous préoccuper », analysons les chiffres disponibles actuellement. L’OMS avait déjà pris la décision de lancer l’alerte en juillet 2022, lorsque la Mpox (de type clade 2b) s’était propagée dans plus de 75 pays non endémiques (régions où la maladie n’existe pas en permanence). Bilan officiel de cette propagation : 87 972 cas diagnostiqués et 147 décès attribués au virus dans le monde entre le 1er janvier 2022 et le 19 juin 2023 selon l’Institut Pasteur.
Le clade 1 circule en République démocratique du Congo depuis des années et c’est en 2023 que l’on y a découvert le clade 1b, présenté comme étant plus contagieux et mortel, et touchant en priorité les plus jeunes enfants, comme le détaillent Les Échos. En 2024, le pays a enregistré « plus de 14 000 cas rapportés et 511 décès ». « Il y a autant de cas rapportés sur les six premiers mois de 2024 que sur l’ensemble de l’an dernier », a indiqué le directeur général de l’OMS lors de son point mensuel sur la santé mondiale le 7 août. En juin, d’autres cas ont été détectés dans quatre nouveaux pays voisins (Burundi, Kenya, Rwanda et Ouganda).
À titre de comparaison, pour l’année 2022, le nombre de morts attribués au paludisme dans le monde s’élève à 608 000, et à environ 13 000 dans la République démocratique du Congo.
◆ Des vaccins incertains envoyés en masse
Ces chiffres ont en tout cas été jugés suffisants pour déclencher l’alerte internationale et l’envoi par l’UE de 215 000 doses du vaccin MVA-BN®, vendu sous les marques Jynneos, Imvamune et Imvanex, élaboré il y a des années au Danemark par le laboratoire Bavarian Nordic (avec l’appui de Fauci et des NHI), pour prévenir la variole tout court. Vaccin dont l’OMS doutait déjà de l’efficacité en 2022 contre la version du monkeypox circulant alors. En effet, Tim Nguyen, haut cadre de l’OMS en charge des maladies infectieuses, déclarait le 23 juillet 2022 : « Nous avons des incertitudes sur l’efficacité de ces vaccins, car ils n’ont pas été utilisés dans ce contexte et à cette échelle auparavant. Et donc comme ces vaccins sont en cours de développement, ils sont développés dans le cadre d’études d’essais cliniques et de la collecte prospective de ces données pour améliorer notre compréhension de l’efficacité de ces vaccins. » À voir si des données plus récentes démontrent son efficacité contre le clade 1b.
Première piste que l’on peut étudier : en France, où il y a eu des cas en 2022 et des vaccinations, environ 30 % des sujets (6 cas sur 19) infectés récemment dans le Val de Loire avaient reçu un schéma vaccinal considéré comme complet 6 mois auparavant, selon les données de Santé publique France.
◆ Bientôt un ou des vaccins à ARNm ?
À voir également si d’autres vaccins seront bientôt approuvés pour la prévention de la variole simienne, en plus du MVA-BN, du LC16m8 japonais et de l’Orthopox Vac russe (ou VacΔ6). Et s’ils obtiendront des autorisations de mise sur le marché rapidement, peut-être même avant la fin des études cliniques, comme cela avait été le cas pendant la crise Covid.
On peut s’attendre à voir arriver dès que possible sur le marché des vaccins de type ARNm, car le rapport du directeur général de l’OMS de janvier 2024 intitulé Éradication de la variole : destruction des stocks de virus variolique annonçait : « Le Comité consultatif a estimé que la poursuite de la mise au point de vaccins adaptables moins réactogènes, tels que les vaccins à ARNm, pour améliorer l’efficacité et la durabilité de la protection, serait essentielle pour combattre une épidémie de variole dans le contexte actuel, si elle devait se reproduire. »
◆ Des questions à résoudre dans un avenir proche
Comment les cas sont-ils diagnostiqués ? Uniquement par l’observation de symptômes physiques et/ou par des tests PCR mis au point qui détecteraient le virus même chez des gens asymptomatiques ? Le nombre de cas augmente-t-il parce que les gens sont davantage testés ? Comment ont été, sont et vont être menées les études des vaccins pour déterminer leur efficacité et leur innocuité ? Comment une telle mutation du virus a-t-elle pu avoir lieu et comment cette souche se retrouve-t-elle à circuler entre humains et à toucher les enfants ? De manière naturelle, ou l’hypothèse d’une fuite de laboratoire peut-elle d’ores et déjà être étudiée sans que l’on soit taxé immédiatement de complotisme ?
L’OMS reconnaît elle-même les risques de conserver en laboratoire des virus comme celui de la variole et réaffirmait en 2007 « ÉNERGIQUEMENT les décisions des Assemblées de la Santé antérieures selon lesquelles les stocks restants de virus variolique devraient être détruits ». Ce qui n’est toujours pas le cas en 2024.
L’Institut Pasteur déclare quant à lui : « La Mpox se transmet à l’humain à partir des rongeurs (par exemple, en Afrique, les écureuils de forêt ou rat de Gambie). » « Toutefois, le réservoir animal n’a pas encore été formellement identifié »…
Article par Estelle Brattesani
⇒ Notre journaliste Senta Depuydt avait sorti en 2019 l’article phare et visionnaire « Vaccins, un plan mondial » dans notre numéro 121 (épuisé au format papier et disponible seulement au format numérique) qui contient des informations majeures sur l’organisation en cours de la gouvernance sanitaire mondiale. Nous l’avons mis depuis en accès libre.
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